Journée mondiale de la liberté de la presse

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Journée mondiale de Liberté de la presse

Le monde célèbre la 31e édition de la Journée mondiale de la liberté de la presse ce vendredi 3 mai. Cette journée est consacrée à l’importance du journalisme et de la liberté d’expression dans le contexte de la crise environnementale mondiale actuelle. D’après l’ONU, le rôle du journaliste est essentiel pour la démocratie et pour la protection de la planète. Mais il faut reconnaître que ces dernières années, nous avons d’énormes difficultés à travailler dans de bonnes conditions. L’exercice du métier de journaliste est de plus en plus risqué.

Rapport annuel RSF sur la liberté de la presse en 2024

La liberté de la presse est mise à mal

La liberté de la presse est mise à mal. Les forces politiques de tous bords ne garantissent pas la liberté des journalistes, indique l’ONG Reporters Sans Frontière (RSF) dans son dernier rapport. Les journalistes sont menacés et moins protégés. L’indicateur politique  est celui qui baisse le plus en 2024, avec une chute globale de 7,6 points, révèle RSF. La France est classé 21e. Exercer le métier de journaliste n’est pas de tout repos dans l’hexagone. L’entrave à liberté d’expression liée à l’A69 en est une preuve. Malgré le cadre légal, les reporters lors de manifestations sont ciblés par les violences policières ou par les manifestants.

L’UNESCO apporte à son tour un autre éclairage sur la sécurité des journalistes. Cette agence des Nations Unies pour la Culture et l’Education et la Science vient de publier une étude et une enquête sur les conditions de travail des journalistes spécialistes des questions d’environnement. En collaboration avec la Fédération internationale des journalistes. 905 journalistes ont répondu à la question concernant l’évaluation de leur sécurité. 41% sont des femmes et 43% viennent d’Afrique. Plus de 70% des journalistes interrogés ont fait l’objet d’attaques, de menaces ou de pression alors qu’ils couvraient des questions environnementales. 41% des journalistes interrogés ont été agressés en plein reportage. 60% ont été victimes de cyber harcèlement.

Plus de 80 % des femmes journalistes rapportent avoir été victimes d’attaques alors qu’elles travaillaient sur des questions environnementales. Ces femmes ont reçu des menaces psychologiques. 42% des femmes journalistes qui ont répondues à l’enquête ont pratiqué l’autocensure. Plus des deux tiers des journalistes interrogés pensent que la désinformation liée au changement climatique a augmenté ces dernières années.

La sécurité des journalistes spécialistes de l’environnement est en effet en danger. Depuis 2009, au moins 749 journalistes dans 89 pays sont victimes d’agression. D’après des données fiables reprises par l’UNESCO, les journalistes attaqués travaillent sur les causes du changement climatique, les mines illégales, la déforestation et les énergies fossiles. Ces journalistes ont réalisé des reportages sur les problèmes spécifiques des communautés tels que l’agrobusiness, l’accaparement des terres, et les conséquences des conditions météorologiques extrêmes.

En 15 ans, l’UNESCO dénombre au moins 194 journalistes et médias menacés en Europe, en Amérique du Nord et dans les Caraïbes. La Police et les forces militaires sont les principaux responsables de ces réprimandes. Depuis 2009, 204 journalistes et médias couvrant les questions environnementales ont fait l’objet de poursuites judiciaires. 93 de ces journalistes ont fait face à des poursuites pénales. Plus de 300 attaques ont eu lieu au cours des cinq dernières années. Il y a une augmentation de 42 % par rapport à la période quinquennale précédente.

Questionner sur l’efficacité des projets

Pourtant le travail du journaliste environnemental ces dernières années est crucial. Le journalisme de solutions est l’un des moyens déployés pour expliquer et analyser les problématiques environnementales. Nous, journalistes expérimentés, avons fait ce choix. La radio Era Environnement, née en 2020, permet aussi d’apporter des éléments critiques sur la situation environnementale aux Comores et dans le monde.

Nous parlons des problèmes environnementaux et analysons les solutions apportées à ces problèmes. Toutefois, nous remarquons un monopole étatique de la communication environnementale aux Comores. Le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) s’occupe de tous les projets environnementaux. L’ Etat comorien lui a donné la permission. La société civile peine à se démarquer et à et apporter une réflexion sur le suivi des solutions présentées par le PNUD notamment.

Ces dernières années, cependant, des ONG dirigées par la diaspora critiquent ouvertement l’inaction de l’archipel en amont des intempéries. Les Comores font en effet face ces dernières semaines à une épidémie de choléra et sont victimes comme au Kenya ou en Tanzanie à des épisodes de pluies intenses provoquant des inondations.

Contre l’auto-censure

Cela fait 16 ans que j’ai réalisé un documentaire sur l’environnement dans ce pays. Il demeure de fait de nombreux questionnements quant à la gestion de la protection de l’environnement dans cet archipel. La population subit régulièrement les effets des dérèglements climatiques sans réel soutien. Les journalistes n’osent pas pousser la réflexion sur la portée des projets et ateliers consacrés à l’environnement. Il est temps de poser les vraies questions. Stop à l’auto-censure. J’appelle tous les journalistes à nous soutenir, et à poser les questions sur les projets financés par le fonds vert climat aux Comores, sur les autres projets d’adaptation au changement climatique dans les zones sinistrées, des zones identifiées de longue date.

J’exhorte le PNUD et d’autres organisations à informer les journalistes sur le suivi des projets. Je demande aux différentes communautés de faire confiance au travail des journalistes. Nous sommes conscients que la liberté de la presse est un sujet complexe aux Comores. L’archipel est 71e dans le classement de Reporters Sans Frontières. L’intimidation et les arrestations de journalistes sont encore monnaie courante notamment en période électorale, rappelle RSF. Nous ne devons pas baisser les bras face à ces dérives. Nous rappelons également la nécessité de former les journalistes, notamment ceux travaillant exclusivement sur les réseaux sociaux. L’information doit porter exclusivement sur des faits vérifiés. Nous pouvons former ces journalistes.

L’annonce du financement du fonds des pertes et dommages est un signal d’alarme. Ce fonds est destiné aux pays les moins avancés et aux Petits Etats Insulaires en Développement. Il a été salué par tous à la COP27. En revanche, il doit faire l’objet d’une attention et d’un suivi particulier. La première réunion du conseil de ce fonds à Abu Dhabi cette semaine a été consacrée notamment à la réflexion sur l’accès aux financement par les communautés touchées par les catastrophes naturelles. Nous, journalistes, sommes dans l’obligation d’enquêter sur les solutions et leur viabilité. Pour le bien être de notre planète. Nous méritons de travailler librement.

Par Houmi AHAMED-MIKIDACHE

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