La conférence des Nations Unies sur les Changements Climatiques présidée par les îles Fidji se poursuit. Les demandes restent les mêmes et sont discutées à travers le Dialogue de Talanoa ( terme signifiant conversation) initié par les îles Fidji et organisé par des consultations informelles, alors que les chefs d’Etats et de gouvernement s’expriment à Bonn. Résumé des travaux.
Par Houmi Ahamed-Mikidache
Ce que pensent les îles Fidji
Face au dialogue de Talanoa toujours en cours, les îles Fidji, premier Etat insulaire à présider la conférence des Nations Unies sur les Changements climatiques reste positives. Mais, elles ont rappelé que la question de la finance et le rôle du fonds d’adaptation font l’objet de 12 articles à l’ordre du jour des travaux de la mise en œuvre de l’Accord de Paris. « Nous, en tant que présidence des Fidji, exprimons notre intérêt spécial de voir comment le fonds d’adaptation va servir l’Accord de Paris et des dialogues sont en cours sur le financement des 100 milliards de dollars par an ( à partir de 2020), a déclaré lors d’une conférence de presse Nazhat Shameem Khan, l’ambassadeur des Fidji auprès des Nations Unies. Le président de la COP 23, le premier ministre Frank Bainimarama, à quant à lui souligné que l’Allemagne a annoncé, à l’ouverture de la COP, un financement de 50 millions d’euros à destination du fonds d’adaptation pour les pays les moins avancés.
Quel est la position de l’Union Européenne?
Cette semaine, l’Union Européenne se donne trois objectifs à atteindre : accomplir les progrès sur l’atténuation, centrés les points mandatés du programme de travail de l’Accord de Paris et maintenir l’équilibre imprimés à l’accord.
Mais quelles ont été les demandes de la société civile?
A l’ouverture des négociations sur le climat, la société civile, au nom d’un groupe d’ONGs, Third World Network, s’est manifestée lors de plusieurs conférences de presse pour une prise en compte des actions pré-2020 dans le cadre du protocole de Kyoto mis en application il y a vingt ans mais non ratifié par de nombreux pays dont les Etats-Unis d’Amérique. « On ne peut parler des actions post-2020, sans traiter des actions pré-2020 » à déclaré Mohammed Ado, de Christian Aids.
Mardi, le Réseau Climat et Développement, représenté par Aissatou Diouf a exprimé ses inquiétudes face au déséquilibre des contributions nationales africaines. « La plupart des pays africains ont mis l’accent sur l’atténuation dans leur Contribution Prévue Déterminée Nationale, le volet adaptation ne doit pas être occulté : Il y a des soucis sur le financement aussi bien pour le fonds d’adaptation que pour le fonds vert.
Le WWF international, quant à lui, a exprimé sa volonté avec d’autres acteurs de la société civile d’ avoir un groupe d’experts qui suivent le mécanisme de Varsovie dédié aux pertes et préjudices, qui va regarder les potentielles sources de financement des pertes et préjudices. « L’une des sources innovantes de financement serait le financement par les taxes sur l’utilisation des énergies fossiles, par exemple, » a déclaré Sandep Chamling Rai, le Conseil Senior des politiques d’adaptation au WWF à Singapour. Toute la semaine dernière ainsi qu’en début de semaine, les peuples autochtones ont montré leur déception face à la tournure des négociations et ont exprimé leurs inquiétudes par des prières.
Pour la société civile africaine, représentée par la coalition de plus de 700 ONGs, PACJA, il est nécessaire que les Etats appliquent un mécanisme d’assurance international d’ici 2020, un mécanisme spécialement conçu pour l’agriculture et les infrastructures en lien avec les objectifs du mécanisme de Varsovie annoncé lors de la 19ème Conférence des Nations Unies sur le climat. Pour Sandep Chamling Rai, le financement des pertes et préjudices n’est pas la seule solution qui pourrait résoudre cette problématique. « Cela va au-delà des questions de financement des pertes et préjudices, il faudrait penser aux déplacés des changements climatiques, » indique-t-il . Et de poursuivre : « Prenons le cas des Maldives, dans le pire des cas, ces îles risquent de disparaître, et les personnes risquent d’être délocalisées, quels pays les accueilleront comme déplacés du climat et quelle sera leur identité ? » interroge-t-il ?
Quels ont été les dires des Négociateurs?
A l’ouverture , le Groupe 77+ Chine, celui des Pays les Moins Avancés, le groupe des négociateurs africains et celui de la Coalition des Nations à Forêts Tropicales Humides ont parlé d’une seule voix : ces groupes ont demandé plus de transparence et d’explications sur le financement des moyens de mise en œuvre des contributions nationales notamment le financement de l’adaptation, du fonds d’adaptation, des transferts de technologies et du renforcement des capacités.
Des délégués francophones, présents lors d’une rencontre informelle jeudi dernier, ont annoncé qu’une soixante de décisions sur le genre venaient d’être adoptées. Pour le négociateur en chef de la république démocratique du Congo et administrateur du fonds vert, Tosi Mpanu Mpanu, ces adoptions ne sont pas surprenantes. « Dans les discussions sur le climat, la question du genre devient centrale : au niveau du fonds vert, lorsque vous demandez une accréditation pour devenir une agence de mise en oeuvre, on vous demande de respecter certains critères, au niveau fiduciaire, certains critères en terme de sauvegarde environnementale, et on vous demande si vous avez une politique centrale accès au genre, » souligne-t-il. Et d’ajouter : « il ne s’agit pas de faire des choses comme avant, c’est-à-dire, mettre la main sur le cœur et dire que les femmes sont les populations vulnérables et qu’il faut trouver des solutions pour les femmes, sans elles : non, la donne a changé, aujourd’hui, il faut intégrer la femme dans la recherche et la mise en œuvre de cette solution comme l’a fait récemment la Tanzanie à travers un projet intégrant les femmes dans l’accès aux énergies renouvelables et à l’entrepreunariat, » explique le négociateur congolais.
Autre point évoqué lors de la rencontre des délégués : le rôle structurel des gouvernements locaux. Pour le négociateur congolais, qui est aussi le représentant de la Coalition des Nations à Forêts Tropicales et Humides, il est nécessaire d’ encourager les entités non étatiques, les régions, les provinces, les entreprises, les villes, les entreprises, ainsi que les organisations non gouvernementales afin qu’elles puissent aider à rehausser le niveau de l’ambition et les inscrire dans un registre sous la Convention. « Nous souhaitons prendre toutes ces initiatives et les intégrer sous l’égide de la Convention, à travers des outils que nous comprenons, la transparence, la rigueur du reporting, mais cette requête n’a pas bien avancé.
Le groupe des négociateurs africains a poursuivi samedi ses demandes « Nous sommes inquiets des progrès sur le financement de l’adaptation, » a déclaré Seyni Nafo, président du groupe des négociateurs africains et diplomate malien. Le groupe Afrique demande aussi à ce que le fonds d’adaptation serve l’accord de Paris . Quant aux Maldives, ils ont plaidé au nom des Petits Etats Insulaires en Développement pour que le Dialogue de Talanoa puisse s’assurer que les conclusions du rapport spécial du GIEC sur la cible 1, 5 degrès celsius soit examinée avant la COP 24. Pour l’Ethiopie au nom des Pays les Moins Avancés, il est nécessaire d’aller de l’avant et de souligner les efforts accomplis, mais il est aussi indispensable de prendre une décision sur le fonds d’adaptation, sur le soutien et la transparence.
L’équateur au nom du G77 plus la chine a plaidé pour ne pas dresser de séparation artificielle entre les aspects techniques et politiques : les ambitions à atteindre doivent passer par l’action avant 2020, les avancées sur les points relatifs au financement, la mise en service du fonds d’adaptation pour l’Accord de Paris, le développement d’orientations sur la communication relative à l’adaptation.