COP 22- Maurice – Structurer les actions climatiques : Fondamental pour l’économie bleue
Plusieurs ministres, institutions internationales et experts ont discuté pendant deux jours de leur conception de l’économie bleue. Présentation
Les enjeux
« L’ambition climatique a des implications économiques assez importantes, » relève Seyni Nafo, président du Groupe des Négociateurs africains à la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques, en marge de la conférence ministérielle sur les économies des océans à l’île Maurice.
D’après Nafo, si la découverte du marché du carbone liée à la vie forestière dans les océans et les opportunités de développement des ressources marines peuvent occuper une place importante dans le développement économique des pays côtiers africains, il en demeure qu’il est difficile d’arrêter subitement l’exploitation gazière et pétrolière, même si cette dernière est en perte de vitesse ces derniers mois. La coopération sud-sud pourrait-elle faire la différence ?
« Environ 110% de la production pétrolière et gazière en Afrique subsaharienne en Afrique est concentrée dans le golfe de Guinée, sans oublier les autres ressources biologiques. Si ces atouts sont bien exploités et gérer, ils représenteront des opportunités réelles de développement économique et permettront de réduire considérablement le taux de pauvreté de nos populations, déclare à l’ouverture de la conférence le Premier Ministre togolais, Komi Sélom Klassou.Mais comment surmonter ces défis et atteindre le développement durable en Afrique ? Mutualiser les bonnes pratiques au niveau régional serait la solution, réaffirment les experts à Maurice.
Mais, les pays côtiers africains sont-ils prêts à travailler avec les pays insulaires du continent ? Ils le font déjà, selon Nafo. « Les Seychelles[Etat insulaire dans l’Océan Indien] forment la Somalie sur le monitoring des zones de pêche, sur l’accessibilité des permis et laissent même à la disposition de la Somalie les infrastructures portuaires seycheilloises, » relève le président du groupe des négociateurs africains.
Le cas du Togo
Situé en Afrique de l’Ouest, le Togo ambitionne d’être un « véritable hub transportuaire dans la sous région ouest africaine . Ce pays s’est inspiré de l’île Maurice pour créer ses zones franches”, rappelle le Premier Ministre togolais . L’une des premières zones franches du Togo est la zone franche de transformation pour l’exportation (ZFE). Son objectif: stimuler son économie dans les chaînes de valeur mondiales (CVM) sur une superficie de 107 hectares sur l’océan atlantique . La ZFE du Togo compte plus de la moitié des exportations du pays et 80% de ses produits sont vendus dans la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO), selon la Banque Africaine de développement. Il existe plusieurs catégories de zones franches dans le monde : les zones de libre-échange, les zones franches industrielles d’exportation, les zones économiques spéciales et les zones industrielles.
Où se positionne l’Afrique dans le développement ?
Pour le Premier Ministre togolais, l’Afrique doit répondre à une série de questions essentielles pour son développement: quels modes de financements de l’économie bleue ? Quels modes de planification des villes africaines ? et quels types de partenariats ? De fait, l’Afrique doit définir ses priorités en investissant notamment dans le domaine de la recherche et le développement, et en tenant compte des dispositions présentées dans l’accord de Paris qui met l’accent sur le soutien et la coopération régionale et internationale, souligne-t-il.
Ce pays côtier a récemment mis en œuvre une stratégie nationale associant l’agenda 2063 de l’Union Africaine et les 17 objectifs du développement durable. Sa vocation : renforcer la sureté et la sécurité maritime, développer l’économie bleue par la promotion des partenariats publics-privés, la modernisation du tourisme maritime en gérant durablement l’environnement marin ( pêche traditionnelle, aquaculture, énergies renouvelables).
Perspectives
Du 11 au 15 octobre prochain, le Togo abritant le seul port en eau profonde du Golfe de Guinée, accueillera le sommet des chefs d’Etats de l’Union Africaine, sur le thème de la sureté et de la sécurité maritime et le développement en Afrique, pour parler d’une seule voix. Mais tout n’est pas si simple. La COP 22 se déroulera en Afrique à Marrakech du 7 au 18 novembre prochain. Seule une trentaine de pays ont ratifié l’accord de Paris. Il n’entrera en vigueur que quand 55 États représentant 55 % des émissions de GES auront ratifié le texte. ” Neuf pays africains ont ratifié l’accord de Paris”, reproche le directeur de l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture, José Graziano da Silva.
Les côtes africaines et les états insulaires africains souffrent pourtant de plus en plus des conséquences des changements climatiques tels que l’ érosion côtière, l’ élévation de la mer, et l’ acidification des océans. Selon le président de la COP 22, Salaheddine Mezouar, la prochaine conférence des Nations Unies sur les Changements Climatiques en Afrique, au Marrakech (Maroc), prévue du 7 au 18 novembre sera une COP de l’Action avec la présentation de nombreux événements parallèles aux négociations.
« Nous, Banque Mondiale et FAO, membres des Nations Unies, pensons que l’Agenda des Océans et des pêches est une priorité pour la lutte contre la pauvreté , ” affirme Jamal Saghir, conseiller régional principal pour l’Afrique à la Banque Mondiale. Et d’ajouter: “Nous sommes très inquiets de voir dans toute la côte africaine, des maisons, des hôtels et des routes qui disparaissent: nous voulons nous assurer que l’érosion côtière soit atténuée avec des actions bien précises. L’agenda des océans doit être au centre des discussions climatiques, plaide-t-il.
D’après ce représentant de la Banque Mondiale, il y aura une journée consacrée aux océans au Maroc, durant la COP. Un des parents pauvres de l’accord de Paris pour l’Afrique, selon des experts.
« Immédiatement après Paris, nous avons commencé avec le gouvernement marocain sur l’agenda de la COP 22 , nous avons analysé les engagements présentés par les pays. On peut voir qu’ils sont vraiment clairs, sur l’accès à l’énergie en Afrique, mais ils ont une approche très générale sur les questions liées à la foresterie, l’agriculture, la pêche et les océans. Nous apportons une assistance technique aux pays africains dans ces secteurs pour affiner leurs engagements. Nous militons pour qu’il y ait une série d’événements parallèles consacrés à ces secteurs pendant la COP 22, » déclare à la presse le directeur de la FAO, en marge de la conférence ministérielle sur les économies des océans à Maurice.
En marge de la COP 21, un business plan pour le climat en Afrique a été présenté par le président de la Banque Mondiale, Jim Yong Kim, conjointement avec les présidents du Gabon, du Sénégal, du Togo, et du premier ministre de Sao Tome et Principe. Ce plan a pour vocation à accélérer un développement résilient au changement climatique sobre en carbone et coûte 19 milliards de dollars américains. D’après Saghir, le chapitre consacré aux économies intelligentes des océans coûte environ 670 millions de dollars américains.