COP 22 : Esprit de Paris et Action
La conférence des Nations Unies sur les changements climatiques, tenue à Bonn du 16 au 26 mai en lien avec ses organes subsidiaires, a organisé la première réunion du Groupe Ad Hoc sur l’Accord de Paris (APA) . Explications.
« Les pays, avec leurs niveaux de développement différents, de différentes régions et d’opinions souvent divergentes sur de nombreuses questions, ont trouvé une vision commune à Paris. Ce travail et cette vision ont continué, et continué de manière positive ici à Bonn, alors que les pays se tournent vers le prochain événement jalon majeur prévu à Marrakech en novembre », a déclaré Ségolène Royal, présidente de la Conférence sur les changements climatiques COP21 des Nations Unies et ministre française de l’Environnement, de l’énergie et de la mer .
La Conférence sur les Changements climatiques au siège de la Convention Cadre des Nations sur les changements climatiques, a eu lieu à Bonn du 16 au 26 mai dernier. La réunion a annoncé plusieurs séries d’actions liées à l’adaptation et l’atténuation. Une de ses actions : la place du genre, à travers un atelier traitant, entre autres, du financement et du renforcement des capacités des femmes issues des pays en développement. La réunion de Bonn s’est penchée sur les trois organes subsidiaires techniques. Elle a aussi permis l’organisation de la réunion du groupe Ad Hoc sur l’accord de Paris (APA). Bonn a également présenté une action sociale plus large pour une ambition pré-2020 plus rapide, dont un événement de renforcement des capacités et un échange des meilleures pratiques dans la sensibilisation du public et l’accès à l’information environnementale, compris dans l’initiative Action pour l’autonomisation climatique (ACE, en anglais).
Que représente le groupe Ad Hoc sur l’accord de Paris ?
Le Groupe de travail Ad Hoc sur l’accord de Paris (APA) est un nouvel organe constitué à Paris, au mois de décembre dernier durant la dernière conférence des Nations sur le Climat. A Bonn, le Groupe de travail Ad Hoc a élu ses deux co-présidentes : Sarah Baashan de l’Arabie Saoudite et Jo Tyndall de la Nouvelle Zélande. APA remplace le Groupe de travail de la plateforme de Durban qui avait pour mandat de parvenir à un accord à Paris. Ses objectifs : préparer la prochaine conférence des Nations Unies sur le Climat à Marrakech, élaborer des principes et des dispositions pour la transparence des actions, l’adaptation, l’atténuation et permettre une entrée en vigueur de l’accord.
A Bonn, la 44ème session de l’Organisation subsidiaire de mise en œuvre ( SBI 44)* a conclu ses travaux en soulignant l’importance des mécanismes nés sous le protocole de Kyoto. Adopté au Japon en 1997, avec l’ambition de réduire les gaz à effet de serre de 5% par rapport au niveau de 1990, le Protocole de Kyoto*, met à disposition des mécanismes financiers tels que le Fonds d’Adaptation et le Mécanisme de Développement propre. Le Fonds d’Adaptation a été conçu en 2001 pour financer des projets et des programmes concrets dans les pays vulnérables en développement. Le Mécanisme de Développement propre est décrit dans l’article 12 du protocole de Kyoto. Il permet au pays qui s’engage dans la réduction de Gaz à effet de Serre de mettre en œuvre des projets sous le protocole de Kyoto. Problématiques : ces deux mécanismes, selon de nombreux experts, ont des difficultés à atteindre les populations les plus vulnérables, notamment celles d’ Afrique.
Quel est l’objectif de l’organe subsidiaire pour la science et la technologie (SBSTA en anglais)?
L’organe subsidiaire pour la science et la technologie soutient le travail de deux entités : le Comité exécutif de la technologie et le Centre pour les technologies climatiques . Les principaux travaux de cet organe visent à traiter de l’impact des changements climatiques, de l’adaptation aux changements climatiques, et de la réduction des émissions résultant du déboisement et de la dégradation des forêts dans les pays en développement (REDD+).
Qu’en pense la société civile africaine ?
Pour Mithika Mwenda, le secrétaire général de l’Alliance Pan Africaine pour la Justice Climatique (PACJA), obtenir le financement des actions lieés au transfert des technologies de pays développés à pays en développement n’est pas une mince affaire. La question reste difficile à résoudre. Il s’est exprimé ainsi après avoir assisté à une réunion informelle de l’organe subsidiaire pour la science et la technologie sur le financement. A Marrakech, il y aura une analyse des différents propos tenus à Bonn à ce sujet.
Comment la science soutient l’accord de Paris ?
L’accord de Paris a souligné l’ambition de limiter la hausse de la température mondiale à moins de 2 degrés, 1,5 degrès sur l’ère pré-industrielle. Pendant deux semaines à Bonn, les pays ont continué leurs discussions approfondies sur le rôle de la science dans le processus de mise en application du texte de Paris. Dans ce contexte, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a convenu d’inclure l’objectif cible de température de 1.5 degré Celsius dans le prochain rapport d’évaluation globale sur la science du climat en 2018.
Quelles seront les prochaines étapes?
La future présidence marocaine devrait mener plusieurs consultations au cours des prochains mois. Le futur président de la COP22, le ministre des Affaires étrangères Salaheddine Mezouar soutient que la COP 22 sera une conférence de l’action.
« Nous comptons sur le soutien de toutes les parties à la COP22 pour que notre solidarité et nos espoirs soient traduits en action pour les générations futures et la planète. Et nous sommes convaincus que le succès de COP22 sera basé sur la contribution active de chacun d’entre nous », a-t-il déclaré à l’issue de la réunion de Bonn.
Mme Hakima El Haité, ministre déléguée marocaine chargée de l’Environnement présente également à Bonn a été nommée Championne de haut niveau pour faire avancer un Programme mondial d’action climat. Mme El Haité et Laurence Tubiana, négociatrice française en chef de l’accord de Paris et autre championne mèneront le programme d’action en mettant l’accent sur l’Afrique et les pays en développement, ainsi que par des réunions clés comme le Med-COP au mois de Juillet et le Sommet des Multinationales du Sud, à Rabat au Maroc prévu les 1er et 2 septembre 2016.
Pour le Secrétariat de la Convention Cadre des Nations Unies sur le changement climatique, la conférence de Bonn a montré des signes positifs de l’entrée en vigueur de l’accord de Paris, avec au moins 177 signataires du texte de Paris. Depuis la signature à New York, 17 pays ont déposé leurs instruments de ratification, qui est l’étape finale de la mise en application de l’accord. L’accord entrera en vigueur dès que 55 pays représentant au moins 55% des émissions mondiales auront déposé leurs instruments de ratification, rappelle le Secrétariat.
Plus tôt, avant que la conférence débute, le président des Pays les Moins Avancés, représentant 48 pays dont 34 en Afrique, Tosi Mpanu-Mpanu a exprimé des inquiétudes et s’était prononcé pour une entrée en vigueur rapide de l’accord de Paris.
« Créant une dynamique politique , les Pays les Moins Avancés vont continuer à promouvoir l’accélération d’une entrée en vigueur de l’Accord de Paris, pour que le monde puisse bénéficier rapidement de sa mise en application, » avait-il précisé.
Avec les outils et mécanismes pour la mise en oeuvre de l’Accord de Paris, ainsi que l’appui des experts techniques, les pays, selon les conclusions de la réunion Bonn, sont prêts à stimuler les actions d’adaptation et de réduction d’émission de gaz à effet de serre avant 2020. Pour le Secrétariat de la Convention, ils pourront le faire à travers des actions telles que la promotion du prix du Carbone ainsi que l’encouragement des solutions de transports durables.
Nouvelle Secrétaire exécutive de la CCNUCC : Mme Patricia Espinosa
La 44 session de l’organe subsidiaire pour la mise en œuvre était la dernière réunion présidée par Christina Figueres, la secrétaire executive de la CNUCCC. Jeudi dernier, une rencontre commune des trois organes de mise en œuvre a tenu à la remercier pour son leadership à Paris. Mme Figueres a elle aussi tenu à remercier son secrétariat ainsi que la société civile pour avoir « capturé le vent du changement à Paris ».
Une autre femme sud américaine la remplacera : Patricia Espinosa. Actuellement ambassadeur du Mexique en Allemagne, Mme Espinosa a plus de 30 d’expérience au plus haut niveau des relations internationales. Elle est spécialiste des questions liées au réchauffement climatique, la gouvernance globale, le développement durable et la protection des droits humains. Elle a été Ministre des Affaires Etrangères entre 2006 et 2012 .
Par Houmi Ahamed-Mikidache
* Le SBI est l’un des deux organes subsidiaires de la Convention établis par la Conférence des Parties
*Le protocole de Kyoto adopté en 1997 est entré en vigueur en 2005. Seuls 37 pays industrialisés se sont engagés à réduire les gaz à effet de serre de 5% par rapport au niveau de 1990. Les États-Unis et la Chine n’ont pas ratifié ce protocole. Cet accord contraignant est arrivé à échéance à la fin de l’année 2012, mais il n’a pas été respecté.